Actionnariat salarié : quatre dirigeants partagent leur expérience

Comment mettre en place l’actionnariat salarié, et pourquoi ? Quelles répercussions pour l’entreprise et sa dynamique ? Quatre dirigeants, Céline Augusto, cofondatrice de Green Family, spécialiste des produits d’hygiène écologiques, Jean-Christophe Blot, Président du Groupe Hélios, dédié aux métiers de la rénovation, Richard Caron, Président-Directeur Général du cabinet de conseil Meotec, et Thea Rosin, Directrice Générale de La Boutique Officielle, une plateforme d’e-commerce dédiée à la mode urbaine, partagent leur expérience sur le partage de la valeur au sein de leur entreprise.

partage de dirigeants sur l'expérience de l'actionnariat salarié

Que représente pour vous le partage de la valeur et pourquoi avez-vous intéressé les salariés ?

Céline Augusto. L’actionnariat salarié est pour nous le prolongement naturel de cette culture de start-up à laquelle nous tenons, même si Green Family est aujourd’hui une PME. C’est un moyen de valoriser l’importance de chaque salarié et sa contribution au succès de tous. L’actionnariat salarié permet d’impliquer chacun dans la réussite de notre projet, de renforcer le sentiment d’appartenance. C’est aussi un important levier de motivation et de fidélisation de nos salariés pour leur donner envie de voir nos ambitions se réaliser !

Nous avons commencé à mûrir ce projet en 2017, alors que notre CA avait été multiplié par cinq. Nous étions alors une petite dizaine et jamais nous n’aurions pu relever le défi de cette hypercroissance sans l’implication, l’énergie et le dévouement de l’ensemble de l’équipe.

Thea Rosin. Chez La Boutique Officielle, nous considérons l’entreprise comme un tout, dans lequel chacun contribue au succès. Le partage équitable de la valeur créée nous semble donc une démarche tout à fait naturelle. C’est une conviction forte que je partage avec Julien Cohen, le président de la société, et avec nos actionnaires. Par ailleurs, il s’agit d’un important vecteur de motivation et de fidélisation.

Jean-Christophe Blot. La fidélisation et le renforcement de l’attractivité du Groupe Hélios sont aussi au cœur de notre démarche dans un secteur, le BTP, qui est aujourd’hui confronté à une pénurie de main-d’œuvre. Ce partage de la valeur vise tout particulièrement l’encadrement intermédiaire, les chargés d’affaires, qui s’est beaucoup rajeuni ces dernières années. L’actionnariat salarié participe à leur envie de rejoindre l’entreprise, et d’y rester. L’autre grand atout, c’est le renforcement de notre gouvernance, puisque nous donnons de la visibilité à nos salariés non seulement dans nos décisions à court terme mais aussi dans notre stratégie à moyen terme. Enfin, il me semble que c’est un moyen, au fond, très juste de partager la valeur.

Richard Caron. En tant que cabinet de conseil, nos collaborateurs sont notre réserve de compétences. L’actionnariat salarié permet à Meotec de les fidéliser mais aussi de développer leur sentiment d’appartenance à l’entreprise. Nous nous revendiquons comme entrepreneurs, et le partage de la valeur à travers la croissance est fédérateur et impliquant. Il a aussi permis de fluidifier les rapports sociaux.

Comment avez-vous mis en pratique l’actionnariat salarié ?

T.R. Lorsque la participation a été mise en place en 2017, nous avons décidé de verser le même montant à tous les collaborateurs, indépendamment de leur statut ou de leur rémunération. Cette décision nous semblait simplement cohérente avec la vision que nous avions de la création de valeur. Depuis, chaque année, nous faisons de l’annonce de la participation un petit événement réunissant l’ensemble des collaborateurs afin de revenir sur le bilan de l’année écoulée et donner le cap pour la suite.

R.C. Ce partage s’est fait en deux temps. Tout d’abord avec ceux qui ont rejoint l’aventure dès les premières années, avec la création de parts au fur et à mesure pour atteindre les 20 % de capital. Ensuite, au moment de l’entrée au capital d’Azulis, nous avons élargi cette participation à 40 collaborateurs représentant tous les métiers de l’entreprise, des ingénieurs d’affaires aux fonctions support, et selon un principe méritocratique. Azulis nous a accompagné dans ce second temps en partageant son expérience sur la mise en place de l’actionnariat salarié.

C.A. En pratique, depuis mars 2020, chaque salarié en CDI à plein temps, avec un an d’ancienneté, reçoit des actions gratuites et un mini-pacte d’associé. De plus, il a la possibilité, s’il le souhaite, d’investir dans des bons de souscription de parts de créateur d’entreprise en plus de ces actions gratuites, et ce pour un maximum de 10 000 €.

J.-C.B. Nous avons fait le choix de proposer des actions gratuites aux salariés qui devenaient actionnaires sur le principe de 1 = 2 (une action gratuite pour une action achetée). Au départ, nous l’avons proposé à quinze cadres du groupe, qui ont tous accepté et sont toujours dans l’entreprise. Nous avons récemment étendu cette proposition à d’autres salariés, dont les managers qu’entreprises que nous avons récemment rachetées.

Comment cela a-t-il été perçu et qu’est-ce que cela a apporté à l’entreprise ? Quel bilan faites-vous de l’expérience ?

R.C. Le retour est extrêmement positif de la part des salariés actionnaires, qui se sentent honorés et fiers de la proposition qui leur est faite. Nous sommes dans une véritable logique de co-investissement qui leur permet de participer plus encore au développement de l’entreprise.

C.A. Cette décision a été accueillie avec beaucoup d’enthousiasme mais aussi de la surprise par nos salariés. En effet, peu d’entreprises proposent des actions gratuites à l’ensemble de leurs collaborateurs, quel que soit leur statut. Il est encore tôt pour tirer un véritable bilan mais nous ressentons un regain d’implication. Et aucune démission ou départ à déplorer depuis ! Ce plan d’actionnariat salarié nous a également permis de renforcer notre image d’entreprise engagée fortement dans la RSE, et pas uniquement dans l’aspect écologique de nos produits, mais aussi dans la gestion de nos équipes.

J.-C.B. Nous n’avons aucun départ parmi les chargés d’affaires – qui sont pourtant parmi les plus jeunes – ce qui est une véritable réussite. En outre, dans une entreprise comme la nôtre, la dimension sociale est très importante, de même que l’implication de tous dans notre stratégie. Être actionnaires donne aux salariés des devoirs mais aussi des droits – ce qui m’incite, en tant que président du Groupe, à m’améliorer, et à être toujours plus clair dans mes choix stratégiques. Pour conclure, il me semble que ce partage de la valeur est la prolongation de notre politique RSE qui met l’humain au cœur de ses engagements.

T.R. Trois ans après la mise en place de la participation, des collaborateurs nous disent encore régulièrement à quel point ils apprécient la démarche de partage égal. Il faut savoir qu’en raison de la forte croissance de La Boutique Officielle et de sa rentabilité solide, les montants versés sont conséquents et peuvent représenter plusieurs mois de salaire. Nous sommes très satisfaits de ce choix : les taux d’absentéisme et de turn-over sont faibles, et il y un climat social harmonieux au sein de l’entreprise.

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